Témoignage recueilli en avril 2022 – équivalent CP – 1ère année complète à l’école


Pourquoi avoir opté pour une école alternative ?

​Nous avons tenté l’école publique dès la maternelle : ce système nous a paru rapidement très dysfonctionnel. Même en tant que représentants des parents d’élèves, il était impossible d’établir un véritable dialogue avec la directrice d’établissement d’un quartier parisien tout à fait « bobo ». Nous avons pourtant été confrontés à des problèmes très sérieux, touchant de nombreux élèves de toutes les sections, mais rien ne devait remonter au rectorat, et les associations de parents n’ont pas été d’un grand secours non plus. Avec la crise, tout s’est aggravé et il n’était même plus possible d’entrer dans l’établissement ou de discuter avec l’enseignante dont nous n’avons jamais vu le visage.
C’est à cette période que notre fille a développé des symptômes de stress importants… à 5 ans ! Elle nous disait que « ça se passait mal » à l’école, et a rapidement fini par ne plus vouloir entrer dans l’établissement.
Notre fille, une enfant sage et sensible, ayant appris à lire très tôt, est devenue l’ombre d’elle-même, pleurant à la moindre difficulté, régressant dans son développement jusqu’à ne plus oser faire la moindre chose, au prétexte « qu’elle allait rater »… C’était effrayant. Finalement, sa maîtresse lui a dit, devant moi : « Arrête de pleurer, prends sur toi ! », ce que j’ai trouvé extrêmement choquant. Je lui ai fait remarquer qu’elle demandait à une enfant de 5 ans de faire… ce dont la plupart des adultes sont incapables : contrôler leurs émotions… Cette vision de l’éducation n’est clairement pas la nôtre.

Pour nous, le plus important est le respect de l’enfant, et le fait qu’en tant que parent, nous sommes impliqués dans l’éducation de notre enfant. L’environnement serein et bienveillant est donc le critère principal, du fait que nous avons une enfant qui est déjà très sage, très sérieuse et particulièrement sensible : un cadre rigide lui est délétère (alors qu’il pourrait être positif pour des enfants plus turbulents, par exemple).

Aviez-vous des doutes en inscrivant votre enfant ? Si oui, lesquels ?

Nous suivions l’évolution de l’école « Etre et Savoir » depuis 3 ans, de loin, regardant les commentaires sur Internet notamment. Nous avions envisagé cette solution depuis le début, mais souhaitions une structure respectueuse de l’enfant (d’autres écoles que nous suivions également n’ont pas répondu à ce critère primordial). Le changement d’école s’est fait très rapidement, en une semaine : notre fille s’est aussitôt métamorphosée. Même s’il a fallu plusieurs mois pour la « récupérer », en quelques semaines, on voyait déjà la différence.
Les doutes principaux concernaient la capacité de l’école à rendre le sourire à notre fille. Nous avons rapidement pu constater que la mission était accomplie.

Quelle a été votre impression les premières semaines ?

Pour cette première expérience « alternative », nous avons été très étonnés dans les premières semaines, voire un peu effrayés par l’autonomie laissée aux enfants. Les éducateurs leur font confiance et l’aspect « sécuritaire » qui surdomine dans l’école publique, est totalement différent dans cette école. Il nous a clairement fallu une période d’adaptation en tant que parents : nous avons pris un peu de recul et observé les enfants qui sont, finalement, la boussole à laquelle on doit se fier. En ôtant la « chappe de plomb » de la peur projetée par les adultes, les enfants s’autonomisent et se responsabilisent. On comprend alors qu’en projetant nos propres peurs, souvent irrationnelles, on immobilise les enfants, on les empêche d’expérimenter ou même de prendre des petits risques. C’est pourtant fondamental dans l’évolution psychologique et la confiance en soi : rien ne leur sera impossible quand ils grandiront. C’est une liberté formatrice qui leur est offerte dans cette école, liberté qui peut clairement déstabiliser nombre d’adultes. C’est un choix à faire.

Et maintenant ?

Notre fille s’est littéralement métamorphosée : elle est enfin rayonnante, elle a pris beaucoup d’assurance et est tout simplement heureuse. Niveau scolaire, elle a clairement un niveau supérieur à celui qu’elle aurait eu au CP classique, évoluant à son rythme, et non à celui d’une classe entière. Clairement, le fait que notre fille soit en contact permanent avec des enfants plus âgés, mais aussi plus petits, est un plus dans son évolution.

Êtes vous inquiet du niveau scolaire de votre enfant par rapport au standard de l’éducation nationale ?

L’éducation nationale n’a clairement pas pour but d’épanouir les enfants, de les rendre autonomes, ou même de transmettre de réelles connaissances : bien au contraire. Il nous paraît évident, depuis notre propre expérience dans le public, que cette institution a été dévoyée aux fil des années afin de répondre à des intérêts privés (comme la plupart des services publics). Elle joue donc un rôle central dans le formatage des esprits, la normalisation et le conditionnement de la population qui se retrouve, de fait, intellectuellement immature, manquant foncièrement de discernement (c’est du moins mon analyse personnelle). L’éducation telle qu’elle est dispensée vise surtout à préparer les esprits à la soumission aux paradigmes dominants (extrêmement délétères), ainsi qu’au « monde du travail »… un monde qui est justement en pleine révolution, à un point inimaginable : ce mode d’éducation est totalement obsolète, incapable de relever les défis à venir. Les personnes qui constituent le corps enseignants sont à nos yeux les premières victimes de ce système extrêmement violent.

Il est primordial pour l’avenir que nos enfants gardent une liberté de penser, une créativité débordante, une autonomie et une confiance en soi maximales. Seuls ces enfants pourront agir activement dans le monde de demain qui sera, de toute évidence, plein de défis. Les enfants à qui ont ôtera ces qualités par une éducation du 19ème siècle (mise sur pieds par les industriels en quête d’une main d’œuvre docile) risquent fortement de n’avoir d’autre horizon que la conformité à toute injonction aussi délétère soit-elle, au prix de leur santé physique et mentale. Nous en avons eu malheureusement la preuve concrète dans les événements récents.
Concernant les connaissances à proprement parler, il me semble que l’école n’est certainement pas la seule source d’apprentissage : en tant que parent, je suis responsable des apprentissages de mon enfant. Il ne s’agit donc pas de déléguer ce pouvoir à une école, mais bien d’agir ensemble, de participer activement, d’être « co-éducateur » (et pas seulement de mon enfant). De fait, je veille de près au « niveau scolaire » de ma fille, non pas comme le ferait l’éducation nationale avec la tyrannie des notes, mais de façon ludique et bienveillante : ma fille apprend sans même s’en rendre compte. Il n’y a pas un « niveau » à atteindre, mais plutôt « une soif à étancher ». L’enfant est naturellement « câblé » pour apprendre : il suffit d’utiliser toutes les occasions qui se présentent (lire les panneaux dans la rue, écrire une lettre à une copine de l’ancienne école, compter la monnaie au magasin…)
J’ai bien conscience que nombre de parents ne sentent pas qu’ils ont « le niveau » eux-mêmes (probablement du fait qu’ils ont été abîmés par le système classique) ou même le temps… Mais je reste persuadée que ce n’est qu’une question de priorité.

Si oui, croyez-vous que l’enseignement “classique” répondrait mieux à vos inquiétudes ?

Certainement pas.

Qu’attendez-vous pour la suite ?

Dans mon esprit, l’éducation « idéale » comporte forcément une éducation à l’image et au son, au montage audiovisuel : dans notre société où l’écrasante majorité de l’information circule par le biais de messages vidéo, il paraît évident qu’un apprentissage est nécessaire pour être en mesure de décrypter correctement les messages visuels et sonores, au même titre qu’apprendre à lire et à écrire. En fait, notre société est analphabète de l’image et du son, et c’est fait à dessein pour « fabriquer le consentement ». J’aimerais donc développer un cours de décryptage et d’apprentissage du montage aux enfants. C’est vraiment un projet que j’aimerais apporter à l’école, même si concrètement, je n’ai pas encore eu le temps de m’y atteler. Et en vérité, je pense que c’est un cours qui devrait d’abord être dispensé aux parents 😄